Il y a soixante-sept ans, entre le 12 et le 13 octobre 1951, se déroule l’un des combats les plus âpres de la guerre de Corée. La bataille de Crèvecoeur. Engagé au sein des forces de l’ONU, le bataillon de volontaires français s’y illustre.
Soldats du bataillon français de l’ONU en Corée sur les colonnes de Crèvecoeur 1951-1052
Après la Seconde Guerre mondiale, la Corée est divisé en deux zone d’occupation, l’une américaine eu l’autre soviétique, qui deviennent finalement deux États séparés en 1948. La Corée du Nord, communiste est soutenue par la République populaire de Chine et l’Union soviétique. À l’inverse, la Corée du Sud, sous influence occidentale, est soutenue par les Nations Unies et plus particulièrement par les États-Unis. Entre volonté de réunification et conflit idéologique, la guerre éclate finalement le 25 juin 1950 par l’invasion de la Corée du Sud par la Corée du Nord. Le conseil de sécurité des Nations Unis appelle alors à la création d’une force de police internationale, confiée aux États-Unis. Le conflit coréen constitue ainsi le premier examen pour la nouvelle ONU.
C’est au sein de cette force internationale (la FNUC) qu’un bataillon de volontaires français trouve sa place. Il est finalement affecté au 23e régiment d’infanterie de la 2e division américaine Indian head. Les raisons de cette participation française sont diverses. On retiendra les mots du général Monclar, commandant du bataillon : Qui disait donc que les Français ne veulent plus combattre. L’engagement, c’est celui de voler au secours de la Liberté.
Dès janvier 1951, le bataillon français reçoit son baptême du feu à Wonju. Le 1er février, il s’illustre en résistant aux assauts d’une division chinoise à Twin-tunnels, au prix de nombreuses pertes. Du 13 au 16 février, il conserve un point de fixation contre quatre divisions ennemies. En mars, il prend avec peine la côte 1037, ouvrant la route jusqu’au 38e parallèle. Fin mai, il contribue à briser l’offensive chinoise, Cela lui vaut trois citations à l’ordre de l’armée française et trois citations américaines.
Après l’offensive chinoise de juin, le commandant allié dirigé par le général Mac Arthur décide d’améliorer ses positions dans le secteur est. Il s’agit d’enlever à l’ennemi un massif important et stratégique, celui qu’on appellera par la suite le massif de Crèvecoeur. Il se situe à quelques kilomètres du 38e parallèle, la frontière d’avant-guerre. Le commandement de la 2e division américaine semble dans un premier temps sous-estimer la capacité de résistance de l’ennemi dans cette position. Malgré le pilonnage des crêtes par l’aviation et l’artillerie lourde, l’assaut direct est un désastre. Les faibles unités qui parviennent sur les hauteurs ne peuvent soutenir les contre-attaques nord coréennes qui tiennent les positions en un combat brutal et meurtrier pour les deux camps. Le 27 septembre, le commandement allié stoppe l’opération et reconsidèrent sa stratégie.
C’est à ce moment que le général Monclar élabore un nouveau plan, qui sera adopté par le commandement américain. Au lieu d’une attaque frontale sur une côte étroite, il s’agit de couper l’approvisionnement et les renforts de la défense nord-coréenne pour tenter un débordement de nuit. La progression des chars Sherman est lente, mais fructueuse : l’encerclement est accompli le 19 octobre, et le dernier bastion de la crête est finalement pris par le bataillon français, le 13 octobre. Après le combat, on dénombre plus de 3 700 pertes alliées, américains et français. C’est un lourd tribut qui amène le commandement de l’ONU à changer sa stratégie. Trop peu de terrain a été conquis pour bien trop d’hommes perdus. Crèvecoeur est la dernière offensive majeure des forces onusiennes. Succède ainsi à cette bataille une guerre de position.
Bien que le bataillon français soit l’unité la plus décorée des armées ayant combattu pour l’ONU et que cette bataille soit considérée comme un haut fait d’armes, on se souvient peu de cet événement et, plus largement, de cette guerre. En Corée, bien plus qu’en France le souvenir de la bataille Crèvecoeur et du combat mené par le bataillon français est vif et entretenu. Une stèle, inaugurée en mai 2010, est posée en contrebas de la côte 931 à la mémoire du capitaine Robert Goupil, tombé héroïquement en ce lieu. Ce monument s’inscrit dans un long chemin de mémoire retraçant le parcours du bataillon français, témoignage d’une guerre toujours présente dans la mémoire du pays du matin calme.