L’œuvre du poète est unanimement célébrée. Moins connu est peut-être son engagement dans la Résistance. Pourtant René Char s’est révélé un chef d’une haute valeur morale et d’une méticuleuse précision, entraînant ses hommes dans de périlleuses opérations avec des pertes insignifiantes. Restera pour tous les Alpins un chef légendaire.
René Char à Céreste en 1943
Né le 14 juin 1907 à L’Isle-sur-la Sorgue dans le Vaucluse, René Char écrit ses premiers poèmes vers l’âge de 17 ans. De 1927 à 1928, il fait son service militaire à Nîmes et commence à collaborer à des revues littéraires. En 1928, son premier recueil de poèmes, Les cloches sur le cœur, paraît à compte d’auteur. À Partir de 1929, il va régulièrement à Paris où il fait la connaissance de Louis Aragon, Paul Éluard et André Breton. Il rejoint le groupe surréaliste; il va aux réunions signe des tracts, affronte les ligues d’extrême droite, participe aux activités militantes en faveur de la révolution espagnole. En 1932, il épouse Georgette Goldstein. Le marteau sans maître est publié en 1934 alors que Char commence à s’éloigner des surréalistes avec lesquels il rompt officiellement en 1935. En 1937 paraît Placard pour un chemin des écoliers, puis en 1938 Dehors la nuit est gouvernée, texte qui font écho à la montée de de l’hitlérisme.
Mobilisé en 1939, il rejoint à Nîmes le 173e régiment d’artillerie lourde qui part en Alsace. Nommé brigadier en 1940, il est chargé d’assurer la protection de la retraite de sa colonne; fait prisonnier, il s’évade et parvient à retrouver son unité. À Gien, il organise sous les bombes le franchissement du pont sur la Loire par les civils et les militaires. Il est décoré de la Croix de guerre. Démobilisé en juillet, il regagne l’Isle-sur-la Sorgue. Fiché comme communiste, il est surveillé par les services de Vichy. Après avoir tenté en vain de trouver une filière pour rejoindre la Grande-Bretagne, Char intensifie ses liens avec les militants antifascistes qu’il a connus avant la guerre et rédige des tracts gaullistes. Sa maison est perquisitionnée par la police. En 1941, il quitte Vaucluse et s’installe à Céreste, un village des basses-Alpes, jusqu’à la fin de l’occupation. Là il continue à écrire, mais refuse de publier. Il met sur pied un premier réseau de résistance qui dépourvu d’armes, fait de la propagande. En mai 1942, Char rejoint l’Armée secrète. Responsable du secteur Durance-Sud, il conduit souvent au combat les premiers maquis bas-alpins. En 1943, il entre dans les forces françaises combattantes avec le grade de capitaine. Adjoint de Camille Rayon envoyé par Londres pour préparer le terrain en vue du débarquement allié, Char prend le pseudonyme d’Alexandre, il devient chef départemental de la section atterrissage-parachutage de la région e (Basse-Alpes, Vaucluse), et restera jusqu’à la Libération. Il mène de nombreuses opérations : Organisation de parachutages, combats contre les SS, coup de main contre la Gestapo. Mais il a toujours à cœur de protéger le village des représailles et de préserver les hommes de son maquis.
Albert Camus et René Char à L’isle-sur-la-Sorgue
Dans la nuit du 11 au 12 juillet, il part en mission à Alger où il arrive le 13 et est affecté à l’instruction des missions parachutées. Fin août, il rentre à Céreste tout juste libéré. Il dissout son réseau, qui compte 2 150 hommes, à la fin de l’année. Et René Char range les armes pour retrouver la poésie.